Prix et récompenses
Trois collaborateurs de l’AFP nommés pour le prix vidéo Rory Peck
Belal al Sabbagh et Youssef Hassouna, à Gaza, et Luckenson Jean, à Haïti, sont nominés pour le prestigieux prix Rory Peck qui récompense depuis 1995 les meilleurs journalistes reporters d'images (JRI) pigistes. Le gagnant sera révélé lors de la cérémonie de remise du prix, le 28 novembre à Londres.
Pour Belal al Sabbagh et Youssef Hassouna, le projet soumis pour le prix est une compilation de vidéos filmées à Gaza entre le 7 octobre 2023 et juin 2024. À eux deux, Belal et Youssef ont enregistré plus de 1000 vidéos en plus de dizaines de retransmissions en direct. Leurs vidéos mettent en évidence l'intensité du conflit, reflétant la souffrance humaine et les destructions à travers le territoire palestinien. La vidéo comprend le direct de Youssef dans la nuit du 27 octobre, qui a capturé des bombardements israéliens massifs, vus depuis le bureau de l'AFP, alors évacué, dans le centre de la bande de Gaza.
Belal a quitté Gaza en avril dernier avec sa femme et sa fille. Youssef est resté. Avec sa famille, il a été déplacé dix fois. Il vit actuellement sous un toit de tôle ondulée dans un garage transformé à Deir al Balah, au centre de Gaza.
Belal Bassam Al-Sabbagh, 33 ans, a commencé à travailler début 2010, parallèlement à ses études universitaires en photographie à l'université Al-Azhar, dans la ville de Gaza. Il a travaillé pour plusieurs chaînes de télévision locales et institutions jusqu'à ce qu'il ait l'opportunité de travailler en freelance pour l’AFP à la fin de l'année 2017. En septembre dernier, il avait été présélectionné pour le prestigieux prix Bayeux des correspondants de guerre. Il est marié et père d'une fille.
Youssef Hassouna, 47 ans, travaille comme caméraman depuis 1995. Son travail a été vu sur de nombreuses chaînes d'information internationales. Il a également travaillé sur des programmes tels que des émissions de fiction, filmées à Gaza. Il est pigiste pour l'AFP depuis 2014. Depuis le début de la guerre à Gaza en octobre 2023, il est l'un des principaux journalistes vidéo indépendants de l'AFP sur place. Il a également travaillé pour une entreprise de papier et d'impression, et comme graphiste. Il est marié et père de six enfants.
La vidéo de Luckenson Jean est composée de plusieurs montages envoyés aux centaines de clients de l'AFP à travers le monde depuis fin février 2024, lorsque Haïti a été plongé dans une crise de violence alors que des gangs puissants et armés se sont déchaînés dans la capitale Port-au-Prince, dans le but de renverser Ariel Henry, alors premier ministre.
Les images commencent par la mort d'un habitant de Port-au-Prince, tué dans les tirs croisés des gangs tôt un matin, alors qu'il tentait de gagner sa vie avant d'emmener son fils à l'école. Les images de Luckenson se poursuivent par des descriptions quotidiennes de la spirale de la violence, montrant la police dans les rues, des citoyens terrifiés fuyant pour se mettre à l'abri et des corps gisant dans les rues.
Au début du mois de mars, il a réussi - grâce à un travail de fond et à des contacts avec la police et les gangs - à obtenir une interview exclusive du célèbre chef de gang Jimmy Cherizier, alias «Barbecue», qui a promis une «guerre civile» si Ariel Henry ne démissionnait pas. La vidéo a été largement diffusée à l’international.
L'objectif de Luckenson de montrer l'impact de la crise sur la vie quotidienne l'a amené à collaborer avec des ONG pour accéder aux territoires contrôlés par les gangs. Il y a visité des cliniques et interrogé des patients qui, autrement, n'ont accès à aucun type de soins. Il a également filmé des citoyens déplacés qui luttaient pour trouver un abri après la destruction de leur maison ou en raison de menaces sur leur famille.
Luckenson a suivi de près l'évolution de la situation politique et l'arrivée, fin juin, d'une force de police kenyane chargée d'arracher la nation caribéenne à l'emprise de ses gangs. Tout au long de cette période difficile, Luckenson a fourni des reportages de grande qualité presque tous les jours.
Luckenson Jean, basé à Port-au-Prince, la capitale haïtienne, est une équipe à lui tout seul : collecteur d'informations, producteur, consultant en matière de sécurité, caméraman, monteur.
Luckenson est né en 1990 et a grandi à la campagne, où sa famille vit toujours, avant de déménager à Jacmel, dans le sud du pays, pour étudier à l'école de cinéma Cine Institute. Après avoir obtenu son diplôme, il a commencé à travailler pour une chaîne de télévision locale à Port-au-Prince avant de passer au travail indépendant et de collaborer avec l'UNICEF et l'AFPTV en 2020. Luckenson se concentre principalement sur les breaking news, en particulier la crise de violence et d'instabilité politique en Haïti. Il met l'accent sur l'aspect humain de ces événements, en documentant leur impact sur ses concitoyens. Il filme dans des camps de personnes déplacées, lors d'urgences médicales et de funérailles - toujours à la recherche d'histoires personnelles qui montrent le désespoir de nombreux Haïtiens.
Les conditions de travail des journalistes en Haïti se sont détériorées en même temps que les conditions de sécurité : Luckenson a déménagé pour des raisons de sécurité et, au plus fort de la violence, il a dû s'installer chez des amis lorsque les barrières entre les quartiers se sont refermées à la suite d'une attaque. Il paie un motocycliste pour l'emmener et le ramener sur les scènes qu'il doit filmer, et il doit faire attention lorsqu’il communique avec les gangs et les autorités pour obtenir des informations. Il considère son travail comme une forme de thérapie. Le plus difficile est de choisir les personnes qu'il interviewe et de ne pas pouvoir écouter tous ceux qui viennent le voir et qui veulent partager leur histoire.